Mon âme est un roseau

Que ce week end fut spécial ! Il résume si bien les évenements d’une vie, un départ, un naissance, une famille…Si bref, et si intense en même temps…
C’est ainsi que je me rends compte à quel point mon coeur reste fragile, peut être pas mon coeur, plutot mon âme même, dans ce qu’on l’a écorchée profondément, dans ce qu’on l’a abimée, écornée, meurtrie…Il ne me semblait pas être encore si hésitante, au bord des larmes, avec cette douleur lancinante qui se cache et traine dans les coins sombres.
Je me rends compte que l’on peut oublier la douleur physique, la rendre moins importante, l’ignorer, lui faire violence, mais comment guérir les bleus de l’âme, ceux que moi seule, et encore, peut entr’apercevoir et comprendre….
Quels sont les mots qui pourraient dire, décrire, ce qui fait mal quand moi même j’ignore exactement ce qu’il en est..
Quand une épreuve vous change profondément, sans savoir exactement en quoi…Non je ne parviens pas à mettre le doigt sur ce qui me chiffonne, sur ce qui reste de ton arrivée mouvementée parmi nous, de la douleur, de la peur, de l’incertitude, de la violence…
Et pourtant, toi et moi, on ne s’est pas laisser aller ! On s’est plutot bien défendus, tous les deux face à la difficulté, à l’injustice, à la malchance…
Comme j’aurais aimé que ton arrivée soit pleine de lumière, de douceur, de joie…Et il n’en fut rien, ni pour toi, ni pour moi…Il me reste comme un goût amer de ce plaisir qu’on nous a enlevé et qui ne pourra jamais se rattraper…Il me reste un fond d’inquiétude pour toi, si petit, si fragile, et déjà si éprouvé…Et pourtant, comme tu t’es battu !! Est-ce ta volonté, la mienne, ou une main bienveillante qui t’as ainsi donné le goût de te battre pour arriver, pour te blottir contre moi, avec tes petits yeux grands ouverts sur le monde…Nous avons fait connaissance dans la même douleur, dans la même déchirure, dans la même épreuve….
Toi, tout chaud contre moi, qui me regarde pour la première fois, et moi qui puise la force dans cet instant de douceur au milieu de toute cette barbarie, moi qui ne voit plus que toi et oublie le monde autour, l’agitation qui règne, l’aiguille qui me pique encore et encore…
A cet instant précis, tu es mon monde à moi, et rien d’autre ne peut m’atteindre que ton petit regard qui s’accroche au mien, qui m’écoute te souhaiter la bienvenue parmi nous…
Comme je suis fière de toi, petit bout d’Homme déjà si courageux, qui emplit mon coeur de jeune maman de tant de fierté, et d’un amour qui nait en même temps que toi…Nous t’avons attendu, nous avons parlé de toi, mais quelques minutes avant ton arrivée, je pensais t’avoir déjà perdu, ne pas avoir la chance de te connaitre, et là…Tu me suprends pour la première fois de ta vie, tu pleures, tu t’époumonnes, et quelle vague de soulagement, de tendresse me
submerge à cet instant précis….C’est là, à t’entendre te battre contre cet armada de médecins incompétents, contre le mauvais sort, contre la mort elle même que je deviens ta maman. Pour toi, j’ai souffert, je me suis battue comme j’ai pu, avant, pendant et encore…Comme j’aimerais que cette souffrance disparaisse, de mon coeur et du tien…Comme j’aimerais que tu n’aies pas souffert, que tu ne souffres plus….Comme j’aimerais que tu restes si courageux,si impatient de vivre ! 

Parfois je me demande…Y a t’il quelqu’un qui a veillé sur toi, qui t’ai aidé ? Parfois je me demande…Quelle empreinte cela va t’il me laisser ?
Les plaies de l’âme se refermeront t’elles ? Combien de fêlures mon coeur pourra t’il supporter ? et puis je me dis …que je me suis étonnée moi-même, de ma résistance, de ma force, de mon envie de lutter pour toi…

Alors voilà, ce week end il y eut un décès…cela m’a rapellé à coté de quoi nous sommes passés toi et moi,cela me dit que nous ne sommes jamais à l’abri, qu’il faut profiter de tous les instants, que même les douleurs font partie du chemin, de notre histoire, que les épreuves nous sont utiles, pour apprendre à nous connaitre, pour flirter avec  nos propres limites, pour les repousser encore, pour se dépasser,que la tristesse, les fêlures sont là pour nous faire prendre conscience que nos coeurs sont vaillants, que notre âme est assez forte pour vivre, malgré la peine, malgré les bleus et les coups…

Oui le chemin est chaotique, imprévisible…On se perd parfois dans quelques coins sombres où l’on pourrait rester à tout jamais, s’il n’y avait pas cette main qui se tend, ce coeur qui s’inquiète sincéremment pour nous, cette affection qui nous soutient, cette tendresse qui nous pousse à foncer, reprendre le cours de notre vie, retrouver la lumière, le sourire …
Oui ce week end, je me suis sentie fragile, j’ai pleuré sur moi, j’ai pleuré sur toi, et sur ce qu’on nous a obligé à vivre…J’ai pleuré de tristesse, j’ai pleuré de joie aussi…De cette joie égoïste d’être en vie, d’être entourée, soutenue, de t’avoir auprès de moi, mon petit coeur, si plein de promesses ! J’ai pleuré de soulagement, j’ai pleuré pour les autres, pour ceux qui souffrent, j’ai pleuré pour la vie qui s’en va, pour la vie qui nait, j’ai pleuré pour les souvenirs, les bons, les mauvais, j’ai pleuré pour l’avenir, en demi teinte, que l’on se dessine…J’ai pleuré pour toutes ces réponses que je n’aurais jamais, pour le hasard, le destin, le sens de la vie…J’ai pleuré enfin, pour soulager mon âme de tout ce fardeau…J’ai pleuré et j’ai trouvé l’épaule qui m’a réconforté, j’ai trouvé les mots qui ont su me toucher, le silence qui a su me comprendre, le coeur qui toujours m’aimera…Ma petite maman, toujours là pour moi et qui me connait, qui sait, dans son regard, me dire qu’elle a comprit, qu’elle devine…
J’espère être ce pilier pour toi, lorsque tu seras grand, lorsque la vie t’égratignera un peu, que tu seras perdu dans un coin sombre, j’espère être cette main qui se tend, le rire qui te donne la joie, le regard qui te verra toujours avec les yeux de l’amour…J’espère être ta maman, pas la meilleure, pas l’idéale, juste TA maman………
Parce que je sais désormais, que mon coeur est capable de tout supporter pour toi, parce que je sais que j’ai la force de tout affronter…
Parce que je sais que sous les bourrasques, je plie, je touche terre parfois, mais je ne rompt pas…
Je t’apprendrais, mon petit chat, à être un roseau, plein de poésie, qui se dresse fier et sauvage… En espérant que ta vie soit pleine de soleil et de brises légères…